« Stop à la régression sociale ! » Les salariés d’Alstom sont remontés. Ce jeudi matin, plus de 120 personnes ont débrayé et boycotté une réunion de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT), à l’usine Alstom de Belfort. Ils s’opposent au projet de la direction de l’usine de réduire de 23 à 12 jours le nombre annuel de RTT des ouvriers et des techniciens. Selon les estimations de l’intersyndicale, 280 à 300 personnes sont concernées sur le site ; aujourd’hui on compte 580 salariés, en CDI. « Une grande partie de l’effectif est concernée », remarque André Fages, de la CFE-CGC. La nouvelle proposition prévoit aussi d’imposer des plages horaires fixes pour les prises de poste.
Deux réunions ont déjà été organisées par la direction sur ce projet. L’intersyndicale s’y oppose depuis le départ. La direction reste ferme, de son côté, sur ses positions initiales. Après l’échec de la seconde réunion, elle a décidé d’annoncer sa décision de réduire le nombre de RTT en publiant un message interne à l’adresse des salariés. Ce qui a considérablement agacé l’intersyndicale.
« Il n’y a pas de dialogue social »
« L’argument avancé sur la nécessité d’avoir « plus de jours travaillés et des démarrages de journée synchronisés entre ateliers et fonctions supports pour mieux répondre aux besoins des clients » est balayé par notre histoire », insiste l’intersyndicale, dans un tract. Aux milieu des années 2000, Belfort fabriquait plus de 100 locomotives par an. Aujourd’hui, c’est quatre fois mois. « C’est leur organisation des dernières années qui a tout désorganisé », estime Eddy Cardot, élu au comité social et économique (CSE), syndiqué à la CGT. Selon les syndicats, c’est le perte de compétences, le management ou encore les sous-effectifs qui déstabilisent l’usine. Si on invoque encore « la compétitivité » pour expliquer cette démarche, Eddy Cardot estime surtout qu’Alstom veut mettre tous les sites au même niveau des 12 jours de RTT.
« Le contexte social est difficile », alerte André Fages. « Les gens sont à cran », précise-t-il. L’annonce de mercredi sur la réduction mondiale des effectifs du groupe ne rassure pas (lire par ailleurs). Les derniers résultats en bourse n’augurent pas non plus des négociations salariales très favorables. « On a une direction jusqu’au-boutiste », dénonce Eddy Cardot. « Il n’y a pas de dialogue social », ajoute-t-il. « Et les salariés sont déterminés à continuer s’il le faut », prévient Eddy Cardot.
L’intersyndicale va solliciter l’inspection du travail sur cette démarche de la direction, qui revient sur un accord signé en 1999. Et elle se questionne aussi sur la cadre juridique de la démarche.
Sollicitée, la direction d’Alstom ne souhaite “pas faire de commentaire”.
Un plan social n’est jamais rassurant
Alstom a annoncé, ce mercredi, la suppression de 1 500 postes dans le monde (lire notre article). Le plan présenté par Alstom pour se remettre en ordre de marche vise à réduire la dette de 2 milliards d’euros d’ici mars 2025. Actuellement, elle s’élève à 3,4 milliards d’euros. Les 1 500 emplois supprimés pour réduire les coûts le seront uniquement dans les fonctions commerciales et administratives et représentent 10% des effectifs de celles-ci. L’usine de Belfort, qui conçoit des locomotives et les motrices du nouveau TGV, devrait être plutôt épargnée. Toutefois, aujourd’hui, les détails du plan ne sont pas connues. Le flou ne rassure pas. « Un plan social, ce n’est jamais anodin », modère André Fages. Des doutes partagés par Eddy Cardot : « Des craintes, on en a. On ne parle que des grandes lignes. » Puis d’ajouter : « Aujourd’hui, il faut assouvir les besoins du capital. » Tous ont en mémoire le traumatisme de 2016. Ils restent donc méfiants.